Assaillis de chants de Noel de tout côté, nous avons bravé les vents violents du blizzard de l’hiver charriant les paroles entêtantes (et plus tenaces qu’un Chien de Tindalos) de Mariah Carey et nous nous sommes réfugiés dans une cabane ludique en plein milieu d’une forêt digne d’une aventure Folk Horror, pour se plonger dans la lecture assidue des nouveautés sorties en 2025.
Après de nombreuses heures éreintantes à lire des dizaines et des dizaines d’ouvrages, confortablement installés sous un plaid avec une bonne bière...hum... tasse de chocolat chaud, la joyeuse bande du Barbu du Jeu de Rôle et moi-même vous avons concocté nos coups de cœur de l’année !
Suppléments, livres de base, scénarios, ou contextes, version française ou version originale, grog à la guimauve, pain d’épice à la moutarde ou sushi de Noël, on ne se refuse rien !
Le coup de coeur de Johan...
... qui tente depuis 3 ans de terminer sa campagne D&D, mais ses joueurs ne veulent pas le laisser faire.
Metro 2033
Inspiré du roman éponyme de l’auteur russe Dmitri Gloukhovski, les compère d'Arkhane Asylum Publishing réussissent à merveille l’adaptation de cet univers sombre et désespéré.
Réfugiés dans les stations du métro moscovite, les survivants de l’apocalypse tentent de survivre tant bien que mal dans un monde où la société s’est effondrée. Se regroupant en communautés, chaque station fait sa propre loi. Les joueurs se verront incarner les habitants d’une petite station de faible importance qu’ils devront faire tenir tant bien que mal. Et pour cela, ils devront parcourir les tunnels sombres et pas toujours vide du métro. Entre créatures mutantes, factions ennemies et phénomènes étranges, le danger est partout et ils devront redoubler de vigilance pour réussir leur mission, et encore plus en revenir vivant.
Magnifiquement illustré et assez facile d’accès, le jeu de rôle devrait convenir à tous les fans de post-apocalyptique, d’horreur, et de l’univers Metro 2033.
De quoi passer l’hiver (nucléaire ou pas) bien occupé !
The Electric State
Pourquoi changer une équipe qui gagne ? Cette année, Free League a remis le couvert en s’inspirant de l’œuvre de l’illustrateur suédois Simon Stålenhag, The Electric State, dans laquelle vous allez vous retrouver embarqués dans une épopée à travers une Côte Ouest des États-Unis en pleine apocalypse numérique.
Après une guerre civile initiée par de grandes corporations qui se sont affrontées sur le territoire américain à coups de drones pilotés par des soldats connectés, le pays tente de se reconstruire. Mais une corporation survivante lance sur le marché une réalité virtuelle si aboutie que les utilisateurs s’y perdent, devenant incapables de quitter d’eux-mêmes leur casque, se laissant mourir d’inanition tandis que leur esprit survit dans un cyberespace sous la coupe d’une IA. Alors que la société se délite lentement sous la domination grandissante de cette entité corporatiste sans scrupule, les joueurs interpréteront des voyageurs qui traversent la côte ouest dans l’espoir de réaliser leurs dernières volontés.
Animé de thématiques fortes, mêlant des inspirations cyberpunks, post-apo et parfois même horrifiques, The Electric State nous transporte dans un univers mature, posant de nombreuses questions sur l’évolution de la société actuelle.
Si une version française n’a pour le moment pas été annoncée, j’espère fort que le titre sera traduit un jour dans la langue de Molière.
Les coups de coeur de Guillaume...
... qui est à deux doigts de lancer une campagne... depuis 5... ou 6 ans (nan, mais la préparation, c'est important)
Section 13
La gamme Cthulhu Hack continue de nous surprendre avec cette nouvelle campagne lovecraftienne !
Section 13 vous propose de devenir, le temps de 6 scénarios, un agent des services secrets britanniques au sein de la section MI 13 spécialisée dans la lutte contre le Mythe de Cthulhu.
Entre espionnage à la James Bond et aventures sombres et Pulp à la Hellboy et le BPRD, Section 13 propose une campagne sérieuse qui fera la part belle à l’action, mais surtout à l’enquête et l’infiltration. Vous êtes des agents secrets, après tout, il faudra donc rester discrets.
Contrairement à d’autres productions bac à sable des XII Singes, la campagne se veut plus linéaire, plus simple à faire jouer pour le MJ. Les joueurs et les personnages ne devraient pas pour autant se sentir enfermés, car même si la trame des six scénarios est plus classique, elle ne prend jamais les joueurs par la main.
Avec ces scénarios variés qui vous feront voyager un peu partout dans le monde, sa tonne d’aides de jeu, pleins de bonnes idées (le QG de la section qui évoluera selon les envies et les réussites des personnages), et une galerie de PJ bien écrits, Section 13 a été, pour moi, la bonne surprise de cette année, au point de me redonner envie de maîtriser en campagne.
Thanatos
L’éditeur Les XII Singes a la fâcheuse (non pas faucheuse) manie de nous sortir des jeux du chapeau. Des jeux qu’on n'attend pas forcément, mais qui font mouche pour peu qu’on prenne la peine de s’y intéresser.
Thanatos c’est un peu ça : un jeu qui n’a pas fait grand bruit, dont on pourrait penser que l’univers médiéval-fantastique est connu. Et, si vous vous êtes arrêté à ça, vous êtes passé à côté d’un excellent jeu. Thanatos aborde avec intelligence les thèmes de la mort, du deuil, du destin et de la fatalité dans un monde de Fantasy (voir Dark Fantasy) dense.
On y joue des Faucheurs, des “élus” du dieu ancien de la Mort Thanatos, choisis pour combattre les non-morts. Le parallèle avec l’univers de The Witcher est facile, mais contrairement à Geralt, vous ne jouerez pas des chasseurs de monstres sur-entrainés, mais des gens ordinaires qui, un jour, deviennent les émissaires du dieu de la Mort. Des émissaires qui seront à la fois des chasseurs de monstres, des exorcistes, des rédempteurs, des confesseurs et des exécuteurs. Et c’est bien là que le jeu prend toute sa saveur.
En tant que Faucheur, il vous faudra parfois répondre aux demandes de Thanatos et éliminer une cible que votre familier (une sorte d’animal totem qui fait le lien entre le personnage et Thanatos) vous désignera. Sans aucune explication, sans justification, vous devrez éliminer un meunier, un seigneur, une guérisseuse, un chevalier… Votre faucheur a toutefois son libre arbitre, mais refuser aura bien sûr des conséquences.
Toute cette thématique est retranscrite dans les mécaniques de jeu. Bien entendu, le dieu de la Mort a accordé certains pouvoirs et aptitudes aux personnages, et peut parfois accorder sa faveur lors d’une épreuve. Mais cette faveur n’est pas gratuite, en retour, Thanatos pourra vous demander de lui rendre un service. En termes de jeu, en piochant une carte dans un jeu de tarot, vous pourrez avoir un bonus à votre test, et arrivé à un certain point, vous serez sans doute obligé de rendre la faveur à Thanatos en acceptant d'éliminer une cible.
Thanatos aborde la thématique de la mort sous ses différentes facettes, dans un univers médiéval-fantastique tout en nuances de gris (l’excellent scénario du livre de base l’illustre parfaitement). Ce n’est peut-être pas un jeu à mettre entre toutes les mains, mais cela a été pour moi une belle découverte, qui mérite amplement sa place dans mes coups de cœur.
Les coups de coeur d'Alex...
... dont on dit qu’il aurait percé le secret des mondes parallèles lui permettant de faire jouer 8 tables simultanément et d’avoir encore du temps pour apprendre le macramé.
Cthulhu by Gaslight
Chassez le tentacule, il revient en rampant...
Cette année, Chaosium nous a proposé la nouvelle édition de Cthulhu by Gaslight, le cadre de jeu le plus inspiré pour de l’horreur lovecraftienne une fois sorti des années folles. Et le traitement est à la hauteur des enjeux : un jeu complet (qui ne nécessite donc pas l’Appel de Cthulhu), une présentation superbe en deux ouvrages et le début d’une gamme très prometteuse.
L’Angleterre victorienne est un terrain de jeu absolument fascinant pour les investigateurs : une société guindée et cloisonnée à l’extrême, l’essor de sociétés ésotériques aussi farfelues que dangereuses, la naissance de mythes et de légendes qui ont marqué l’inconscient collectif jusqu’à aujourd’hui et un monde qui reste encore mystérieux et inexploré. Car l’une des excellentes idées de Cthulhu by Gaslight 2025, c’est de s’ouvrir à l’ensemble de l’Empire Britannique, avec une description des colonies et des contrées dans lesquelles les personnages pourront voyager.
Ces deux livres m’ayant conquis par leur qualité et leur exhaustivité, ne reste plus qu’une question : à quand une version française ?
Mutant Year Zero : Elysium
Avec ce quatrième volume, Arkhane Asylum clôt la gamme Mutant Year Zero et nous permet d’avoir un panorama global sur cette proposition unique. Avec quatre jeux décrivant chacun un aspect d’un même univers, on pourrait être inquiet : le Monde des Ténèbres des années 2000 nous rappelle que l’exercice est périlleux et que décliner un univers partagé en différents jeux peut mener à de sérieux problèmes de cohérence.
Mais ce n’est pas le cas avec le monde de Mutant Year Zero, dont on devine qu’il a été pensé d’emblée avec cette approche en tête, plutôt que par opportunisme mercantile.
Donc ce coup de cœur vaut pour la gamme dans son ensemble, au sein de laquelle Elysium ne démérite pas. Chaque jeu est jouable indépendamment, propose une campagne propre (souvent bâtie sur le même modèle, qui demande pas mal d’implication des joueurs et de préparation pour le MJ) qui permet potentiellement de “finir” le jeu. Et avec les quatre campagnes et le crossover “La Mort Grise”, les joueurs auront largement exploré la proposition ludique de l’univers.
Mais chaque jeu reste approchable sans aucune connaissance des autres, ce qui constitue le tour de force de la gamme. Vous aimez Wall-E et les robots ? Jouez à Mechatron. Vos joueurs savourent les Tortues Ninja ? Genlab Alpha est fait pour eux. Bref, il y en aura pour tous les goûts, pour peu qu’on apprécie le postapocalyptique.
L’une des gammes de jeux de rôle les plus cohérentes sur le marché français !
Le coup de coeur de Robin...
... qui nous demande notre avis sur un jeu avant de l’acheter, mais qui l’achète avant qu’on ait pu le lui donner.
Pendragon - Coffret Découverte
ENFIN ! C’est ce que je me suis dit en voyant la nouvelle édition de Pendragon en français finalement disponible.
Pendragon c’est un jeu sorti en 1985. Et on sent dans les règles l’héritage de 40 ans de jeu de rôle qu’il y a derrière. Mais comme dit ma grand-mère : “C’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleurs jeux de rôle”.
Dans ce coffret, vous allez trouver tout le matériel pour jouer une campagne dans le monde des légendes d’Arthur et de la Table Ronde, au Ve siècle dans le royaume déchiré de Logres… Vous incarnez de jeunes écuyers et pourrez espérer finir chevaliers, à condition de survivre aux multiples embuches de la série de scénarios.
Et là où Pendragon est très fort, c’est qu’à la fin de cette aventure, vous devriez être des chevaliers confirmés, bien établis et en route vers la gloire. Vous comprendrez alors que le jeu complet vous invitera à marier votre chevalier, à ce qu’il ait des enfants afin que vous ayez de nouveaux personnages à incarner lorsque le vôtre sera trop vieux pour l’aventure et se consacrera à son domaine.
Parce que oui, dans Pendragon vous incarnez un personnage, mais également une dynastie. Il faudra vous occuper de votre domaine, de votre époux ou épouse etc. Mais tout cela se trouvera dans le jeu complet.
Parlons maintenant du matériel contenu dans ce coffret de découverte qui est incroyablement complet et va même au-delà du simple nécessaire : en sus des trois (!) livres souples contenant d’abord une aventure solo pour vous familiariser avec les règles, le livret de scénarios et les règles vous trouverez un écran souple de MJ, plein de feuilles d’aide de jeu, les dés de jeu, les feuilles de personnages et une carte absolument magnifique qui donne juste envie d’être encadrée et accrochée au mur.
Attention tout de même : ce jeu n’est pas à mettre entre toutes les mains et s’adressera à un MJ confirmé qui ne craindra pas de passer un peu de temps à s’assurer que les joueurs ont bien compris les règles qui peuvent être un poil touffues.
Mais quel plaisir à jouer et faire jouer !
